Les figures d’amplification se servent de différents outils pour modifier le degré d’intensité des mots ou groupes de mots en augmentant ou en affaiblissant leur force d’expression.
L’amplification est un procédé d’écriture qui permet de renforcer la portée d’une idée, d’un sentiment, souligner l’impact d’une action, faire ressortir le trait caractéristique d’un objet, d’un personnage, d’une situation, qu’ils relèvent de l’éloge ou du dénigrement, de la beauté ou de la laideur, de la grâce ou de la vulgarité, de l’excellence ou de la médiocrité, de l’enthousiasme ou du dégoût.
L’amplification consiste à cumuler un ensemble de termes ayant la même fonction dans la phrase pour créer un effet volontairement excessif ou introduire une touche comique, jusqu’à l’incongru. L’amplification, se servant de l’énumération, de l’exagération, des inventaires hétéroclites, est destinée à rendre la chose écrite ou orale plus vivante, plus dynamique.
L’amplification est très utilisée dans les slogans publicitaires et vise à exagérer l’idée, le concept par rapport à une réalité. Elle utilise différents procédés pour, dirons-nous simplement, en rajouter, avec force superlatifs, quantités, jusqu’à l’excès.
Voici les figures d’amplification fréquemment employées :
-> L’hyperbole
« L’Ingénu ne pouvait se séparer d’elle que pour aller délivrer un ami : il y vola.»(Voltaire, L’Ingénu, 1767)
-> L’accumulation
« Elle commençait à tout typiser, individualiser, synthétiser, dramatiser, supérioriser, analyser, poétiser, prosaïser, colossifier, angéliser, néologiser, et tragiquer […]. »(Honoré de Balzac, La Comédie humaine, Illusions perdues — À propos de Mme de Bargeton)
-> La gradation
« Se taire. Écouter. Laisser déborder. »(Albert Camus, Carnets, IV, 1076)
Plan de l'article
L’hyperbole
Étymologie : Le mot hyperbole est issu du grec hyper signifiant « au-delà » et balein signifiant « lancer » désignant l’action de « lancer par-dessus ; l’excès ; l’exagération de langage ».
L’hyperbole est une figure de style utilisant l’exagération pour exprimer une pensée, une idée ou en employant des termes dont le sens est trop fort par rapport à la réalité désignée.
Elle est présente dans l’écriture emphatique, imposante, confère un caractère grandiose voire solennel. Elle constitue l’instrument majeur des œuvres épiques pour décrire de grandes batailles, des situations extrêmes (emphase de la révolte), traduire la beauté, le courage ou la violence des personnages, exprimer des sentiments puissants (crainte, joie, admiration, affliction, souffrance…), user de son pouvoir de dramatisation par l’escalade dans la gravité d’un phénomène, la théâtralisation de l’émotion.
C’est une sorte de jeu dans lequel la manipulation des mots, par ce qu’ils révèlent d’incroyable, guide vers une vérité.
L’hyperbole intervient par l’emploi de superlatifs, de comparaisons irréalistes, de pluriels insolites des noms abstraits, de mots excessifs, d’adjectifs hyperboliques (immense, magnifique, illustre, passionné, désastreux, triomphant, cruel, immonde, etc.), par des nombres disproportionnés. L’exagération tend vers l’impossible, jusqu’à glisser un effet humoristique.
Exemples :
Je suis mort de fatigue.
Si je suis encore en retard, le directeur va me tuer.Il est le dernier des derniers.Cet enfant est un diable.
Ton histoire est vieille comme le monde.
Il est le plus grand photographe du siècle.
Son dernier roman est hypergénial !
Ça fait des heures que je poireaute !
Je te l’ai répété un million de fois.
J’étais mort de rire.
On s’est creusé la cervelle toute la soirée pour trouver la réponse.
Ça me tue ce que tu me dis !
Pas besoin de couper les cheveux en quatre.
Ce procédé use souvent de la métaphore pour accentuer l’exagération.
Exemples :
Ma vie est un enfer.
Elle est belle à tomber par terre.
Il est arrivé trempé comme une soupe.
L’hyperbole est très présente dans la publicité, considérée comme un véritable outil de stratégie commerciale pour porter la qualité d’un produit ou d’une marque à son plus haut sommet. Les thèmes vont cibler la sensibilité du public en exagérant des détails, en sublimant la beauté, la performance, la résistance, la saveur, le parfum, etc. et agir comme par envoûtement, susciter l’empathie pour les attributs d’un produit ou encore utiliser l’humour comme instrument de séduction.
Le message doit frapper les esprits et use pour cela d’adjectifs visant à présenter la « vérité » des choses de manière excessive pour qu’elle produise la plus grande impression possible. Ainsi sont très courants les emplois suivants : les préfixes hyper, ultra, méga ; le suffixe : issime ; les termes ou groupes de mots dont l’impact est puissant : incroyable, le meilleur, le plus performant, magnifiquement, tellement, etc.
Le message peut aussi avoir une connotation agréable, délicieuse, excitante pour annoncer la satisfaction promise et atteindre le merveilleux, pour parvenir à la vérité en amenant à croire ce qui est incroyable. Au final, même sans croire à la vérité ou à la totalité du message reçu, ce dernier laisse quand même des traces dans l’esprit des consommateurs.
Exemples :
« Get 27, c’est l’enfer. »(Crème de menthe appartenant à la société Bacardí-Martini)
« Féminissime beauté. »(Lingerie Lejaby)
« Le plus grand secret de beauté de tous les temps. »(Produits cosmétiques Elisabeth Arden)
L’accumulation
Étymologie : Le mot accumulation est issu du verbe latin accumulare, dérivé de cumulare signifiant : « accumuler, entasser, amonceler, augmenter, accroître, grossir ».
L’accumulation est une figure de style par laquelle on développe une phrase en y réunissant un grand nombre de mots ou de groupes de mots de même nature et de même fonction, dont le sens est proche et destiné à augmenter le nombre de détails pour développer le thème principal, introduire un effet de profusion, de foisonnement, donner de la force et du relief à l’idée exprimée. Cet outil n’a pas d’autre finalité que d’amplifier le propos, sans ajouter d’autre sens.
L’accumulation n’est donc pas une répétition de termes mais un procédé de construction consistant à associer, juxtaposer différents objets. Cette technique est notamment utilisée pour créer une situation d’attente, maintenir dans l’impatience de connaître un dénouement ou d’obtenir une révélation grâce à un entassement de termes introduits de manière décousue, saccadée pour donner une impression de désordre, de confusion.
Ce procédé est également employé comme tactique dans une démonstration qui accumule un certain nombre d’arguments, de preuves, pour prouver le bien-fondé d’une affirmation et favoriser la persuasion.
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L’accumulation de noms
Exemples :
Et l’atmosphère résonnait du fracas des spectateurs qui, massés sur les quais, n’étaient que cris, sifflements, hurlements, qu’encouragements et applaudissements, sans oublier les rires et les chants pour accueillir le vainqueur du Vendée Globe.
« Quand un homme a un bec de canard, des ailes de canard et des pattes de canards : c’est un canard. C’est vrai aussi pour les petits merdeux. »(Michel Audiard, Les Vieux de la vieille)
« Les clients itou radinent, se demandant, en anglais, portugais, espagnol, allemand, italien, français, néerlandais, suisse, russe, hongrois, monégasque, arabe hindoustani, chinois, japonais, congolais, guyanais, finnois et en aparté ce qui se passe. »(Béru contre San-Antonio, Frédéric Dard)
L’accumulation d’adjectifs
Exemples :
« Je m’en vais vous mander la chose la plus étonnante, la plus surprenante, la plus merveilleuse, la plus miraculeuse, la plus triomphante, la plus étourdissante, la plus inouïe, la plus singulière, la plus extraordinaire, la plus incroyable, la plus imprévue […] »(Marquise de Sévigné, Lettres)
« Pour expliquer combien ce mobilier est vieux, crevassé, pourri, tremblant, rongé, manchot, borgne, invalide, expirant, il faudrait en faire une description qui retarderait trop l’intérêt de cette histoire […] »(Le Père Goriot, Balzac)
L’accumulation de verbes
Exemples :
« On brandissait les drapeaux, on tapait du pied sur les carrosseries, on battait des rythmes nouveaux pour saluer les onze héros […]. Il fallait crier, hurler, pleurer, danser pour oublier quatre années de purgatoire. C’était Marseille-sur-Liesse. »(Extrait d’un « Cahier de supporter », évoquant la victoire de l’OM sur Thonon en 1984, qui consacra la remontée de l’équipe en première division.
« […] aux uns écrabouillait la cervelle, aux autres rompait bras et jambes, aux autres délochait les spondyles du cou, aux autres démoulait les reins, avalait le nez, pochait les yeux, fendait les mandibules, enfonçait les dents en la gueule, décroulait les omoplates, sphacelait les grèves, dégondait les ischies, débesillait les faucilles […] »(Gargantua, Rabelais)
« Qui peut-ce être ? Qu’est-il devenu ? Où est-il ? Où se cache-t-il ? Que ferai-je pour le trouver ? Où courir ? Où ne pas courir ? N’est-il point là ? n’est-il point ici ? Qui est-ce ? »(L’Avare, Acte IV, scène VII, Molière)
« Moi quand on m’en fait trop, je correctionne plus : je dynamite, je disperse, je ventile. »(Les Tontons flingueurs, Georges Lautner)
La gradation
Étymologie : Le mot gradation est issu du latin gradatio signifiant « gradin ; passage successif d’une idée à une autre », dérivé de gradus signifiant « pas, marche, allure ; échelle, degré, rang » et par extension « augmentation ou affaiblissement par degrés ».
La gradation est l’accumulation par énumération de plusieurs termes qui se rapportent à un même thème, évoquent une idée similaire.
Ces termes sont ordonnés selon une progression d’intensité croissante ou décroissante. Ce procédé permet d’exprimer ou de développer une même idée qui peut gagner ou perdre en intensité, en assemblant plusieurs termes qui enchérissent les uns sur les autres. C’est le moyen de donner un effet plus saisissant, plus dramatique à une description, d’agir sur les émotions, d’intensifier un sentiment ou, à l’inverse, de le modérer, de renforcer un effet comique ou de le rendre ironique, d’aller de l’idée ou l’expression la plus vive, la plus saisissante vers celle qui affaiblit l’effet produit initialement.
La gradation engendre une tension narrative en conduisant graduellement un épisode à son point décisif. Les termes de la gradation progressent par le sens. On distingue la gradation ascendante et la gradation descendante.
La gradation ascendante
La gradation ascendante dispose les termes dont la progression de sens augmente en allant du plus faible au plus intense, le dernier étant souvent hyperbolique. On augmente peu à peu la force des mots pour produire un effet de dramatisation.
Exemples :
« Va, cours, vole, et nous venge. »(Le Cid, Corneille)
« C’est un roc ! c’est un pic ! c’est un cap !Que dis-je, c’est un cap ? … c’est une péninsule ! »(Cyrano de Bergerac, acte I, scène IV, Edmond Rostand)
« C’en est fait ; je n’en puis plus ; je meurs, je suis mort, je suis enterré. »(Molière, l’Avare, acte IV, scène VII – La cassette)
-> Elle est très présente dans la publicité.
Exemples :
« Dubo, Dubon, Dubonnet ! »(Marque de vermouth aromatisé au quinquina, commercialisée depuis 1976 par Pernod Ricard)
« On joue, on marque, on gagne. »(Slogan du Loto sportif)
La gradation descendante
La gradation descendante, à l’inverse, dispose les termes dont la progression de sens diminue en allant du plus fort, du plus exagéré au plus faible, dans une comparaison qui perd de son intensité, en créant une sorte d’essoufflement.
Exemples :
« Œil pour œil, dent pour dent. »
(Loi du Talion, formule biblique)
« Ça dure bien toute une nuit à brûler, un village, même un petit, à la fin, on dirait une fleur énorme, puis rien qu’un bouton, puis plus rien. »
(Céline, Voyage au bout de la nuit)« On lance des sorts à celle qui verra le jour, on lui concocte un avenir, on la prédestine aux plus hautes tâches, à la gloire, à la renommée, ou encore à pas grand-chose. »(Catherine Mavrikakis, Ce qui restera)
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